À Lagos, la capitale économique du Nigeria, les taxis n’acceptent pas toujours la carte bancaire. En revanche, certains conducteurs prennent désormais… le Bitcoin. Dans une région où l’accès aux services bancaires traditionnels reste limité, la cryptomonnaie s’impose comme une alternative crédible. Discrète mais puissante, cette révolution monétaire façonne une nouvelle économie africaine, numérique, décentralisée et résiliente.
Un terrain fertile pour l’innovation monétaire
L’Afrique subsaharienne est l’une des régions les plus dynamiques au monde en matière d’adoption de cryptomonnaies. Selon Chainalysis, elle représente déjà 2 % des transactions mondiales en crypto, mais avec une croissance annuelle de plus de 120 %.
Ce succès s’explique par des réalités concrètes : taux de bancarisation faible, instabilité des monnaies locales, frais de transferts internationaux élevés. Dans ce contexte, Bitcoin, Ethereum ou stablecoins comme l’USDT deviennent des outils d’émancipation économique.
Du transfert d’argent à l’entrepreneuriat numérique
Les premiers usages concernent les transferts d’argent. Face aux coûts prohibitifs de services comme Western Union, les diasporas choisissent les crypto-actifs pour envoyer des fonds à leurs proches. Résultat : des économies locales irriguées sans passer par les circuits financiers traditionnels.
Mais la dynamique va plus loin. Au Ghana, des développeurs créent des start-ups Web3. Au Kenya, des agriculteurs tokenisent leur production pour accéder à des financements via la blockchain. Ces initiatives redessinent les contours de l’économie informelle.
Obstacles, régulation et potentiel durable
Rien n’est simple pour autant. Plusieurs gouvernements, comme celui du Cameroun ou de l’Éthiopie, ont tenté de bloquer l’usage des cryptos, craignant le blanchiment d’argent ou la perte de contrôle monétaire. Mais d’autres pays, à l’image du Rwanda, avancent vers une régulation encadrée et inclusive.
L’enjeu est de taille : canaliser les innovations sans freiner l’essor d’un écosystème qui pourrait favoriser l’émergence d’une classe moyenne numérique africaine.
Derrière le buzz autour du Bitcoin, une transformation profonde est à l’œuvre. En Afrique, les cryptomonnaies ne sont pas une mode : elles répondent à des besoins concrets, systémiques, souvent vitaux. Et si le prochain miracle économique venait du code plutôt que des mines d’or ou de pétrole ?